D’ailleurs, c’est sous le label « Kafka Goes Pink » qu’il présente sa toute récente ligne de petits meubles, de luminaires et autres objets d’intérieur, inspirés du patrimoine libanais et revisités à la sauce contemporaine occidentale. Une idée de design née à Prague où, découvrant la beauté raffinée et baroque de cette ville qui a su conserver son cachet traditionnel, Fady Saliba s’est pris à rêver de patrimoine libanais revisité, réactualisé en design contemporain, au subtil mélange de lignes épurées et de ciselures baroques orientalisantes.

« L’idée était de relooker l’artisanat traditionnel libanais en design contemporain et luxueux », explique cet artiste, à la double formation de peintre et d’architecte d’intérieur.

En associant dans ses créations mobilières les mystères de l’Orient et la fonctionnalité moderne de l’Occident, Fady Saliba a conçu des tables basses ou d’appoint, à plateaux en bois clair incrustés de motifs floraux en nacre, montés sur piétements en acier inoxydable ; des plats et plateaux de service en cuivre étamé incrustés de motifs pastilles, façon sixties, ou de cristaux Swarovski (la grande maison praguoise) ; ou encore, et surtout, de magnifiques luminaires en cuivre étamé et ciselé en arabesques à la manière d’un « moucharabieh ». Des appliques, des lustres, des luminaires, en forme de boules ou de cloches ottomanes posées sur plateaux qui, allumés la nuit, dégagent une sorte d’ambiance magique orientale. Et le jour jouent la carte de l’élément décoratif contemporain, nimbé de grâce. Des pièces en séries limitées, fabriquées selon le savoir-faire ancestral des artisans libanais.
 
De fleurs en pommes
D’épurements en arabesques, de portraits intérieurs en paysages apaisés, de coups de cœur en attachements indéfectibles, le travail de Fady Saliba varie au gré de sa sensibilité peu commune. Reste une constante : le talent. Un don artistique révélé dès l’enfance, lorsqu’à 11 ans, mû par une sorte de nécessité intérieure, il casse sa tirelire pour aller s’acheter un chevalet, une palette, des pinceaux et des tubes de peinture. Il s’attelle alors directement à sa première œuvre : un bouquet floral. « Ma grand-mère, à qui je montrais fièrement cette première toile, m’a félicité en me déclarant que les pommes que j’avais peintes étaient superbes », se souvient-il encore aujourd’hui avec amusement.

Deux ans plus tard, il fera un portrait criant d’expressivité de cette même grand-mère, alors souffrante. Un tableau qui déterminera son chemin d’avenir. Il sera peintre.

Expression d’une personnalité affective vibrante, sa peinture reste sous-tendue d’un travail de recherche constant. Elle attirera l’attention de ses professeurs à l’ALBA, notamment Rima Amuyni et Nicole Malhamé Harfouche, la doyenne du département des arts plastiques, qui l’encouragent dans ce sens. Georges Haddad, le doyen de l’ALBA, le pousse, quant à lui, dans la voie de l’architecture d’intérieur. Le choix est difficile. La peinture va l’emporter dans un premier temps. Car, « fils de la guerre, dans un monde immoral, j’utilise mon pinceau pour combattre et couvrir les bêtises de la vie », dit-il.

Sauf que les arts appliqués finiront par suivre, pour cet esthète curieux « de voyages, de découvertes, de culture et de vie », mais qui garde au fond de lui « l’ambition de faire connaître le savoir-faire et le goût libanais, un peu à la manière d’Élie Saab ».
C’est ainsi que de l’exploration, dans ses toiles, de la matière, la forme et la couleur, il passe, progressivement et avec alternance, au maniement des matières « nobles », des formes architecturales et épurées, et des motifs d’un subtil raffinement, dans la création d’objets.

Des œuvres picturales ou conceptuelles qui portent cependant toujours l’empreinte de la « vie », des « sourires », des « âmes grises », des « soleils » ou encore des « ombres » de leur auteur.