Dernièrement, il a entrepris des travaux de rénovation de son «trois cubes» et a fait appel au designer Jean-Guy Chabauty, un autre «mordu» d'Habitat. L'objectif commun: actualiser l'aménagement sans perdre l'esprit rétro des lieux. La méthode du designer? Renouveler tout en respectant le langage architectural du bâtiment. Résultat? Jean-Guy Chabauty a su injecter une dose (contrôlée) de design Pop et de folie yéyé sans tomber dans l'effet musée. En prime, le logement est plus fonctionnel que jamais.

Design Pop

Le design Pop des années 60 puise dans plusieurs sources: le mouvement psychédélique, l'Op Art, le kitsch et la fascination pour l'ère spatiale. Surtout, on le reconnaît à ses couleurs franches et à ses meubles aux formes audacieuses.

Voilà qui correspond exactement au style de l'aménagement choisi par Jean-Guy Chabauty. La preuve, un panneau de verre rouge vif intégré au garde-corps de l'escalier donne le ton dès l'entrée. L'effet est punché! Ce panneau de verre coloré placé devant une des fenêtres agit comme une lentille et laisse filtrer le décor extérieur tout en lui donnant un air irréel.

Une cuisine à la fois rétro et conviviale

«La cuisine avait déjà été rénovée lors de mon arrivée, mais je la voulais beaucoup plus pratique et conviviale», explique François Leclair. Vaste et multifonctionnel, un îlot a été créé. Un plan de travail en Corian blanc doté d'un évier moulé a été installé. «Pour mieux évoquer la philosophie du plastique et du moulage des années 60», explique le designer.

Autre évocation rétro: le teck. Cette essence de bois n'est pas sans rappeler l'âge d'or des meubles scandinaves. Dans l'appartement, un placage de teck enveloppe l'îlot et une partie des armoires de cuisine, ainsi que l'intérieur du garde-manger de type penderie.

Les portes coulissantes du garde-manger affichent un contour métallique, dans l'esprit des armoires de cuisine d'origine.

Un large panneau de teck suspendu au plafond sert à délimiter l'espace «cuisine». Il permet aussi de faire courir discrètement des fils électriques d'une extrémité à l'autre de la pièce.

Beauté intérieure-extérieure

En entrant, on aperçoit un mur de béton à l'état brut. Le gypse a été retiré afin de mieux admirer l'écart entre deux cubes de béton. L'effet est impressionnant. «On peut ainsi mieux comprendre l'assemblage des modules», affirme le designer.

Matières à réflexion

La réflexion (propre aux années du chrome et du plastique) s'exprime dans le rangement laqué ultrabrillant de la cuisine. Autre élément réfléchissant: une photo de mode dénichée dans un magazine Vogue de 1967 a été posée derrière un panneau de plexiglas. L'ajout de métal chromé dans le garde-corps participe également au jeu des matières réfléchissantes.

Ovni brillant

Impossible de la louper: la fabuleuse suspension Sputnik 20 (par Jolina) porte bien son nom. Son design nous ramène à l'ère spatiale et au satellite russe Spoutnik. Tout chromé, le luminaire miroite dans la fenêtre donnant sur l'avenue Pierre-Dupuy. L'esprit de l'aménagement se transmet donc à l'extérieur. Quant aux spots noirs du plafond, Jean-Guy Chabauty a effectué des recherches avant de les faire produire dans un style correspondant parfaitement à celui d'Habitat.

Les couleurs de l'Expo

Trois affiches originales de l'Exposition universelle de 1967 sont exposées dans le salon. La couleur du sectionnel conçu par Jean-Guy Chabauty un violet intense fait écho aux affiches rétro. Sur un tapis à poils longs (extra-shaggy), trône une table d'appoint en verre fumé.

Cette pièce aux dimensions plutôt modestes plaît au designer. «Les espaces de l'architecture moderne ne sont ni trop grands ni trop petits et permettent de circuler aisément», dit-il.

Impossible de louper la porte coulissante laquée de la chambre principale. Attention les yeux: elle est d'un vert pomme éclatant, un coloris également inspiré des affiches du salon. Cette porte se referme contre un long rangement (plus de 10 m de long) plaqué de teck. Pourquoi l'avoir fait déborder? «C'était ma façon d'évoquer les modules en porte-à-faux du bâtiment», justifie le designer.

Coin musée

Deux pièces du sous-sol ont été préservées: la salle de bains en fibre de verre moulée et la chambre des invités. Dans la petite salle de bains, deux éléments ont cependant dû être renouvelés: la robinetterie et le revêtement de sol.

Du côté de la chambre, tout est authentique, du rangement doté d'un système d'éclairage jusqu'aux interrupteurs à deux boutons-poussoirs.

Enfin, cet appartement joyeusement rétro aurait été incomplet sans quelques passeports de l'Exposition de 1967. Le propriétaire a fait encadrer ceux de sa famille.

Source d'inspiration: Panton

L'influence du Danois Verner Panton, designer-culte des années 60, est probablement la plus palpable dans l'appartement. La preuve, six chaises blanches en plastique moulé (identiques aux originales de Panton) entourent la table de la salle à manger. On peut également admirer un agrandissement photo d'une autre de ses créations: l'environnement en mousse aux formes organiques et aux couleurs psychédéliques Phantasy Landscape présenté en 1970, à Cologne.

Dans le même esprit, Jean-Guy Chabauty a réalisé un canapé modulaire composé de trois sièges aux couleurs hallucinantes: violet, rouge et orange. Détail: il est possible de les entasser pour former un carré. Cette pièce de mobilier est posée sur un tapis noir et crème aux imprimés graphiques.

Marqueterie authentique

«Je voulais absolument conserver le plancher», souligne François Leclair. Lors des rénovations, la pose de carreaux de céramique dans la cuisine a toutefois posé des problèmes de «raccord» entre les nouvelles et les anciennes lames parallèles du parquet. Perfectionniste, le propriétaire a refait lui-même les travaux. «J'ai posé plus de 1000 lames et, avec l'aide d'un teinturier, j'ai reproduit la couleur du vernis vieux de 40 ans», affirme-t-il.

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